Le mois de mars passe a une vitesse
effrayante. Très peu d'attentats, aucun dans Beyrouth. L'arrivée
des beaux jours et une relative accalmie sécuritaire pousse les gens
à sortir, les concerts et les événements culturels en plein air se
multiplient. A l'entrée des centres commerciaux, les jeunes et les
moins jeunes déposent machinalement leurs sacs et le contenu de
leurs poches sur les tapis roulants situés a côté des portiques de
sécurité, afin qu'ils soient scannés. La rapide palpation qui suit
ne leur fait plus rien, et à moi non plus. Les checkpoints, les
contrôles des services de renseignements lorsqu'on s'attarde plus de
quelques secondes près d'un bâtiment sensible, les véhicules
blindés qui s'installent ici ou là le temps de quelques semaines,
tout ça est devenu normal. Ca ne plaît pas aux libanais, qui pour
beaucoup ne supportent pas de devoir se plier à toutes ces
contraintes et désespèrent de nous voir nous y accoutumer sans trop
broncher.
On parle beaucoup de politique dans les
journaux, dans les taxis et entre européens, mais nos amis libanais
n'abordent pas le sujet avec nous. La plupart d'entre eux n'accordent
pas la moindre confiance aux bonhommes en lice pour la présidentielle
qui aura lieux en mai, et pour cause : les candidats sont les
mêmes depuis les années 70, et ont pour la plupart les mains
couvertes de sang depuis la guerre civile. Le refrain « j'en
peux plus de ce pays, je partirai dès que possible » est
toujours repris en cœur par beaucoup de déshérités et de
désabusés qui écarquillent les yeux lorsqu'on leur fait part de
notre amour pour ce pays malade mais fascinant.
En Syrie, le massacre général
continue. La prise de la ville de Yabroud par l'armée syrienne
déclenche de brefs combats dans Beyrouth, surtout au sud. De mon
canap', j'entends des rafales de kalashnikovs, sans jamais savoir si
elles sont le signe d'échanges de tirs ou de célébration. Les
éclopés syriens sont partout au bord des routes, et il est
impossible de passer plus de 3 minutes dans un café ou un restaurant
sans qu'un gamin aux yeux vides vienne essayer de vous vendre des
chewing gums ou des mouchoirs. Selon divers organisme dont le Haut
Comité pour les Réfugiés (HCR), il y aurait toujours entre un
million et un million et demi de syriens au Liban, soit entre un gros
quart et un petit tiers de la population.
Côté bonnes nouvelles, beaucoup de
sorties, ami parisien de passage oblige. Beaucoup de graffiti aussi :
le plus gros événement graffiti de l'histoire du Liban prend place
les 22 et 23, sur la façade décrépie d'une usine vide qui se
recouvre petit à petit de peintures allant de l'acceptable (mon
humble collaboration) à l'extraordinaire (la femme et les cochons de
Zed et Taz, deux artistes locaux).
Une petite soirée dans les montagnes à Bologna (nommé ainsi à cause du... Bois de Boulogne), occasion de respirer un peu et de rencontrer des gens intéressants (cultivés et réalistes quand à la situation du pays et à son histoire) ou terrifiants (un flingue dans la main, 3.5 grammes d'alcool dans les veines et un tempérament impulsif).
Le mur de l'immeuble Demco Steel, le dimanche 23 mars |
Une petite soirée dans les montagnes à Bologna (nommé ainsi à cause du... Bois de Boulogne), occasion de respirer un peu et de rencontrer des gens intéressants (cultivés et réalistes quand à la situation du pays et à son histoire) ou terrifiants (un flingue dans la main, 3.5 grammes d'alcool dans les veines et un tempérament impulsif).
Vue des montagnes, prise du toit d'un immeuble à Bologna |
Chouettes anniversaires fêtés sous
des pluies diluviennes et dans un appartement -le mien- rempli de
toiles blanches, d'amis motivés et de bombes de peintures.
Et
des plans pour la suite qui commencent à se préciser.
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