jeudi 5 juin 2014

Accalmie et graffiti (mars 2014)

Le mois de mars passe a une vitesse effrayante. Très peu d'attentats, aucun dans Beyrouth. L'arrivée des beaux jours et une relative accalmie sécuritaire pousse les gens à sortir, les concerts et les événements culturels en plein air se multiplient. A l'entrée des centres commerciaux, les jeunes et les moins jeunes déposent machinalement leurs sacs et le contenu de leurs poches sur les tapis roulants situés a côté des portiques de sécurité, afin qu'ils soient scannés. La rapide palpation qui suit ne leur fait plus rien, et à moi non plus. Les checkpoints, les contrôles des services de renseignements lorsqu'on s'attarde plus de quelques secondes près d'un bâtiment sensible, les véhicules blindés qui s'installent ici ou là le temps de quelques semaines, tout ça est devenu normal. Ca ne plaît pas aux libanais, qui pour beaucoup ne supportent pas de devoir se plier à toutes ces contraintes et désespèrent de nous voir nous y accoutumer sans trop broncher.

On parle beaucoup de politique dans les journaux, dans les taxis et entre européens, mais nos amis libanais n'abordent pas le sujet avec nous. La plupart d'entre eux n'accordent pas la moindre confiance aux bonhommes en lice pour la présidentielle qui aura lieux en mai, et pour cause : les candidats sont les mêmes depuis les années 70, et ont pour la plupart les mains couvertes de sang depuis la guerre civile. Le refrain « j'en peux plus de ce pays, je partirai dès que possible » est toujours repris en cœur par beaucoup de déshérités et de désabusés qui écarquillent les yeux lorsqu'on leur fait part de notre amour pour ce pays malade mais fascinant.

En Syrie, le massacre général continue. La prise de la ville de Yabroud par l'armée syrienne déclenche de brefs combats dans Beyrouth, surtout au sud. De mon canap', j'entends des rafales de kalashnikovs, sans jamais savoir si elles sont le signe d'échanges de tirs ou de célébration. Les éclopés syriens sont partout au bord des routes, et il est impossible de passer plus de 3 minutes dans un café ou un restaurant sans qu'un gamin aux yeux vides vienne essayer de vous vendre des chewing gums ou des mouchoirs. Selon divers organisme dont le Haut Comité pour les Réfugiés (HCR), il y aurait toujours entre un million et un million et demi de syriens au Liban, soit entre un gros quart et un petit tiers de la population.

Côté bonnes nouvelles, beaucoup de sorties, ami parisien de passage oblige. Beaucoup de graffiti aussi : le plus gros événement graffiti de l'histoire du Liban prend place les 22 et 23, sur la façade décrépie d'une usine vide qui se recouvre petit à petit de peintures allant de l'acceptable (mon humble collaboration) à l'extraordinaire (la femme et les cochons de Zed et Taz, deux artistes locaux). 


Le mur de l'immeuble Demco Steel, le dimanche 23 mars























Une petite soirée dans les montagnes à Bologna (nommé ainsi à cause du... Bois de Boulogne), occasion de respirer un peu et de rencontrer des gens intéressants (cultivés et réalistes quand à la situation du pays et à son histoire) ou terrifiants (un flingue dans la main, 3.5 grammes d'alcool dans les veines et un tempérament impulsif).


Vue des montagnes, prise du toit d'un immeuble à Bologna

Chouettes anniversaires fêtés sous des pluies diluviennes et dans un appartement -le mien- rempli de toiles blanches, d'amis motivés et de bombes de peintures.

Et des plans pour la suite qui commencent à se préciser.

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